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Neouma
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12 février 2014

Anthologie de Tanger, II/X

 

"Tanger, c’est tout autre chose, comme un creuset qui enfanterait des rêves, comme un berceau propice à la création. Ne me demande pas pourquoi : je ne le sais pas. J’aimerais te faire comprendre et partager cette magie qui ne s’explique pas. Elle est. Tout simplement. Et ainsi, elle me porte. Elle me tue aussi. Il arrive que, parfois, elle m’inspire. C’est pourquoi je l’accepte. Si ce n’est pas vrai, laisse-moi au moins le croire. Peux-tu accepter l’idée qu’une ville puisse ainsi…

L’émotion visiblement mal contenue, Julia interrompit son propos. Le garçon du Café Tingis s’affairait auprès d’eux : tel un jongleur de cirque provincial, il retenait en équilibre instable les deux cafes con leche, posés sur un plateau en plastique qui avait dû, neuf, être transparent. Il fit semblant d’essuyer la table avec un chiffon gras qui laissa plus de traces qu’il n’en enleva, et, en grommelant, posa les deux tasses, deux verres d’eau fraîche, enfin quelques mouchoirs en papier de soie, serrés dans un petit présentoir marqué aux couleurs du Tingis."

 

                                                                      Sable bleu, Jan Van Aal, 1996. (p. 75)

 

sablebleu

Le passage met en valeur l’apport  de Tanger dans la création artistique. Tanger la muse. C’est ainsi qu’en témoigne l’Histoire de la ville. Le lecteur est invité à découvrir et partager le charme captivant de Tanger à travers le regard subjectif de Julia. L’évocation de Tanger, pour elle, ne peut se faire sans émotion : « L’émotion visiblement mal contenue, Julia interrompit son propos ». Tanger est puissante par sa simple existence : « Elle est. Tout simplement. »

Le second paragraphe met l’accent sur la dextérité du garçon du Café Tingis à servir les deux cafés. Le narrateur laisse entendre son ironie sur la malpropreté du lieu : « il fit semblant d’essuyer la table avec un chiffon gras qui laissa plus de traces qu’il n’en enleva. »

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Commentaires
N
Tanger ne cesse d'étonner effectivement et il y aurait certainement d'autres facettes à découvrir en elle en permanence. Les petits passages cités nous révèlent des points de vue distincts. Bonne fin de semaine ^_^
I
Vos billets sur Tanger m'ont rappelé les deux voyages de Delacroix et Loti à la ville du détroit au XIXè siècle :<br /> <br /> "Je viens de parcourir la ville. Je suis tout étourdi de tout ce que j’ai vu. Je ne veux pas laisser partir le courrier, qui va tout à l’heure à Gibraltar, sans te faire part de mon étonnement de toutes les choses que j’ai vues. Nous avons débarqué au milieu du peuple le plus étrange. Le pacha de la ville nous a reçus au milieu de ses soldats. Il faudrait avoir vingt bras et quarante-huit heures par journée pour faire passablement et donner une idée de tout cela."<br /> <br /> Eugène Delacroix, Souvenirs d’un voyage dans le Maroc, Paris, Gallimard, 1999, p.21-22.<br /> <br /> <br /> <br /> "Entre des rangées de petits murs blancs, blancs comme des neiges mortes, on monte à la ville. Au-dessus de ces murs du premier plan, on en voit d’autres qui s’étagent, qui s’étagent, qui montent très haut, festonnés et crénelés, et tout déformés par le temps, tout arrondis par les couches laiteuses de la chaux arabe."<br /> <br /> Pierre Loti, Au Maroc, Rabat, Eddif, Collection BAB, 2008, p.26-27.
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